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Les Druzes, alliés d’Israël : la complexité d’une minorité méconnue

  • Photo du rédacteur: thibo périat
    thibo périat
  • 17 juil.
  • 3 min de lecture

On les dit protégés par Israël. On les croit chrétiens. On les imagine isolés. Les Druzes ne sont rien de tout cela. Derrière cette minorité souvent méprisée dans les médias occidentaux se cache une réalité bien plus dense, à la croisée de la religion, de la géopolitique et de la survie identitaire.


Une foi cachée, née dans les montagnes


Le druzisme naît au XIe siècle, dans l’actuel Liban-Syrie, sur les bases de l’islam chiite ismaélien, mais en s’en éloignant rapidement. Doctrine ésotérique, culte fermé, pas de conversion possible : les Druzes gardent leurs textes secrets et leurs croyances protégées par le silence. Une minorité dans la minorité, nichée dans les hauteurs du Levant, entre le Mont-Liban, le plateau du Golan et le sud de la Syrie.


Ils ne prient ni dans des mosquées, ni dans des églises. Ils ne se réclament ni de Mahomet ni de Jésus. Leurs figures sacrées sont plus proches de la philosophie grecque que des dogmes coraniques. Ils ne sont pas musulmans, pas chrétiens, mais simplement… druzes.


En Israël, un statut unique parmi les Arabes


Depuis la création de l’État d’Israël en 1948, les Druzes y occupent une place à part. Contrairement à la majorité des Arabes israéliens, ils servent dans l’armée, notamment dans des unités de combat, et certains atteignent de hauts postes dans l’appareil sécuritaire. L’État les considère comme une minorité loyale, une forme d’exception arabe dans un pays en conflit.


En retour, ils bénéficient de certains avantages symboliques : reconnaissance politique, intégration institutionnelle, présence dans la police, les mairies, la Knesset. Mais cette loyauté n’est pas sans tension. La loi fondamentale votée en 2018, qui définit Israël comme l’État-nation du peuple juif, a été vécue comme une trahison. Des manifestations druzes ont secoué le pays, dénonçant une citoyenneté de seconde zone.


Entre Golan, Syrie et Liban : les jeux d’équilibre


Dans les hauteurs du Golan annexé par Israël, des villages druzes vivent toujours avec une identité ambiguë : citoyens israéliens de facto, mais fidèles à la Syrie de jure. Pendant la guerre civile syrienne, Israël leur a discrètement porté assistance, de manière humanitaire ou tactique, pour éviter que le chaos ne déborde.


Au Liban, les Druzes forment une force politique à part entière, notamment autour de la figure historique de Walid Joumblatt, héritier d’une dynastie politique influente. Tour à tour alliés et adversaires des autres communautés, ils jouent souvent les équilibristes, entre Hezbollah, chrétiens et sunnites.


Ni croix ni évangile: une identité religieuse mal comprise


Alors pourquoi les confond-on si souvent avec les chrétiens ? Par ignorance, surtout. Parce qu’ils sont arabophones, minoritaires et parfois perçus comme modérés. Parce qu’ils sont soutenus par Israël, ce qui dans l’imaginaire occidental peut évoquer un camp « pro-occidental ». Mais les Druzes ne prient pas le Christ. Ils n’appartiennent à aucune Église.


Leur proximité avec Israël ne vient pas d’une communion religieuse, mais d’un pacte politique et sécuritaire, né dans les années 1950, quand les élites druzes israéliennes ont choisi l’intégration plutôt que la confrontation.


Fidèles à eux-mêmes


Plus qu’un peuple religieux, les Druzes sont une communauté de destin. Ils ne cherchent pas à convertir. Ils ne se mêlent pas aux autres groupes. Ils protègent leurs rites et leur mémoire comme un trésor. Et ils naviguent, depuis des siècles, dans les interstices des grands empires et des petits États.


Ce n’est pas leur foi qui dicte leurs alliances, mais leur capacité à survivre. Aujourd’hui comme hier, être druze, c’est vivre en équilibre sur la ligne de crête. Ni croisés, ni croissants. Ni dominants, ni soumis. Mais toujours là.

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