Macron et le crépuscule de l’influence française
- thibo périat
- 29 juin
- 3 min de lecture
Il voulait redonner à la France sa voix.
Huit ans plus tard, le monde parle sans elle.
Emmanuel Macron avait promis une diplomatie « souveraine », une Europe « puissance », une France au centre du jeu mondial. Il voulait, à défaut d’être chef de guerre, être stratège de la paix.
Mais à mesure que les fronts s’allument, la France recule, s’efface, se tait.
De l’Afrique au Proche-Orient, du Sahel à Bruxelles, ce n’est pas simplement l’impuissance qui frappe : c’est l’effacement.
L’Afrique, l’abandon
C’est le symbole le plus cruel de ce déclassement.
Un à un, les bastions militaires français sur le continent africain ont chuté.
Bamako, Niamey, Ouagadougou : trois capitales, trois ruptures.
Trois pays qui ont ordonné, parfois dans l’humiliation, le départ des forces françaises.
Et derrière chaque avion C-130 qui pliait bagage, c’est un morceau de présence stratégique qui s’évaporait.
Plus de Barkhane. Plus de relais. Plus d’emprise.
Jamais depuis la décolonisation la France n’avait été aussi absente d’un continent qui fut son pré carré.
Et ce vide ne dure pas. Wagner l’a rempli. Pékin s’est implanté. Téhéran s’est invité.
La France n’est pas partie, on l’a sortie.
Une armée figée dans un autre siècle
Le paradoxe est cruel.
La France possède l’arme nucléaire, un porte-avions, des sous-marins lanceurs d’engins, des forces spéciales reconnues.
Mais sur le terrain des conflits contemporains, elle paraît démunie.
Guerres hybrides, drones bon marché, désinformation, proxys armés : le monde a changé de grammaire militaire.
Et la France, elle, reste prisonnière d’une logique de dissuasion héritée de la Guerre froide.
Le feu couve en Afrique, au Moyen-Orient, en Europe de l’Est.
Et Paris n’a souvent qu’un seul levier : le mot « nucléaire », brandi comme un totem… mais inopérant face à des guérillas, des bandes armées, ou des frappes asymétriques.
La France a l’arme absolue.
Mais elle ne sait plus comment gérer l’ordinaire du chaos.
Diplomatie : autodestruction contrôlée
C’est l’autre front, plus discret, mais tout aussi ravageur : la diplomatie.
En 2022, dans un geste de modernisation autoritaire, Emmanuel Macron supprime le corps diplomatique.
Fini les ambassadeurs de carrière, les stratèges de crise, les bâtisseurs d’influence.
Place aux hauts fonctionnaires interchangeables, diplomates d’occasion dans un monde de tempêtes.
La mesure passe. L’effet est dévastateur.
Dans les couloirs du Quai d’Orsay, la mémoire s’efface, l’expertise s’évapore, les réseaux se délitent.
À l’étranger, les chancelleries s’interrogent : à qui parler, quand la France ne sait plus qui elle envoie ?
La diplomatie, jadis arme silencieuse de Paris, est devenue muette, bancale, désarmée.
Un isolement qui s’achète à crédit
Pendant ce temps, la France s’enfonce dans une impasse budgétaire.
Avec plus de 3 200 milliards d’euros de dette, un déficit abyssal et une note dégradée, l’État navigue à vue.
Et en Europe, la sanction est froide.
• Berlin regarde ailleurs.
• Rome trace sa route.
• Les pays du Nord, eux, ne veulent plus financer la “grande nation” en déclin.
La France apparaît désormais comme un poids plutôt qu’un moteur.
Macron voulait entraîner le continent derrière lui. Il l’a perdu devant les chiffres.
Paroles sans écho, monde sans réponse
Il reste alors le verbe. Et Macron sait parler.
De conférence en sommet, il multiplie les envolées.
Sur la paix en Ukraine, la stabilité au Sahel, la désescalade entre Israël et l’Iran, la régulation de l’intelligence artificielle…
Mais le monde, désormais, ne tend plus l’oreille.
Ses prises de position ne font plus date.
Ses propositions n’engagent personne.
Ses alertes résonnent dans le vide.
Le monde d’après s’écrit sans la France.
L’Europe, le faux allié
Il rêvait d’un leadership continental.
Il a hérité d’un continent fragmenté, méfiant, essoufflé.
L’« Europe de la Défense » ? Personne n’en veut vraiment.
La « souveraineté européenne » ? Une abstraction politique dans un champ de mines diplomatiques.
Les « initiatives françaises » ? Trop verticales, trop floues, trop solitaires.
Macron, faute d’avoir uni, a lassé.
Et dans les réunions à huis clos, la France n’est plus le moteur : elle est la question.
Une addition géopolitique
Tout cela n’est pas accidentel.
C’est le produit d’un enchaînement, d’un style, d’une vision.
Une France trop sûre d’elle, trop bavarde, trop centralisée.
Un président stratège sans terrain, qui a réformé ses leviers avant de vérifier qu’il en avait encore besoin.
• Une armée mal adaptée aux guerres d’aujourd’hui
• Une diplomatie décapitée
• Une influence africaine envolée
• Une économie trop fragile pour peser en Europe
• Et une parole présidentielle qui ne porte plus
Que reste-t-il ?
Une silhouette solitaire, dans les travées d’un monde qui tourne plus vite que sa stratégie.
Un président qui voulait incarner le XXIe siècle, et qui regarde le sien s’éloigner.
Peut-être n’a-t-il pas été dépassé.
Peut-être a-t-il simplement désarmé la France dans tous les domaines où elle aurait dû se renforcer.
Et que le monde, sans animosité, lui tourne aujourd’hui le dos.




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